Luttons contre la guerre et le fondamentalisme
et pour la paix et la démocratie !
Partisans de la liberté, soeurs et frères,
Le 8 mars 2001, à l'occasion de la Journée internationale de la femme, RAWA avait exprimé le souhait de voir le 8 mars suivant, c'est-à-dire 2002, célébré dans un Afghanistan libéré. Durant l'année passée, la communauté internationale a été choquée par des événements partis de l'Afghanistan, des événements qui ont changé le cours de l'histoire. Beaucoup de choses sont arrivées en Afghanistan - dont l'une des pires a été le régime taliban avec ses soutiens d'al-Qaeda - mais malgré les changements, nous constatons amères que notre pays est encore bien loin d'être libre. Les femmes du monde célèbrent la Journée internationale de la femme avec enthousiasme, en Afghanistan les femmes ne se sentent pas encore assez en sécurité pour quitter leur burqa, encore moins pour élever la voix en soutien de la liberté et de la démocratie. Il persiste encore un fossé entre l'avenir glorieux que nous nous sommes fixé et notre situation. C'est comme si le Destin avait décidé que la nation la plus pauvre de la planète ne serait pas apte encore à défaire les chaînes confectionnées par les despotes et vampires fondamentalistes.
Cette constatation n'est en rien un signe de désespoir ou d'absence de foi dans des lendemains meilleurs. Depuis plus de vingt ans, RAWA a parcouru, intrépide et opiniâtre, un chemin couvert de larmes et de sang. Nous connaissons bien les périls et les dangers de la voie que nous suivons, et notre résolution ne baissera pas pour poursuivre le combat contre le fondamentalisme religieux et ses défenseurs sur le chemin de la paix, de la démocratie, du progrès et de l'émancipation de la femme. Nous ne succomberons ni aux doutes ni aux désillusions.
Bien que nous ayons déjà souvent présenté nos vues sur les questions importantes, à la suite des attentats horribles perpétrés par des fanatiques religieux sur New York et Washington, nous nous permettons à nouveau de réitérer nos positions. Nous espérons ainsi répondre aux nombreuses questions posées par les sympathisants de RAWA en Afghanistan et ailleurs :
1. RAWA et la campagne militaire américaine contre les taliban et al Qaeda
RAWA a souligné plusieurs fois le fait que les taliban, Ben Laden & Co., et les autres groupes de fondamentalistes en Afghanistan sont les créatures de la politique américaine vis-à-vis de la guerre de résistance afghane contre l'invasion soviétique. Tant que ces monstres créés ont été utiles à la poursuite de la politique américaine, les gouvernements successifs américains les ont soutenus en permanence et ont fermé les yeux sur les intérêts du peuple afghan et sur les conséquences d'un tel soutien sur la liberté et la démocratie dans notre pays et dans la région. RAWA est très fière d'avoir toujours condamné la politique américaine et de n'avoir jamais cédé à la pression, à la "circonspection" ou à l'opportunisme politique ou financier.
Nous considérons l'Amérique comme une grande nation qui a beaucoup contribué à la civilisation, ainsi qu'au progrès social et scientifique. Le peuple américain est bien conscient du massacre d'Afghans innocents en réponse aux bombardements américains en Afghanistan. Il l'a démontré amplement lors de manifestations contre la guerre en Afghanistan dans la plupart des grandes villes américaines. RAWA a été inondée par des milliers d'e-mails venant de tous les États-Unis exprimant leur sympathie avec notre peuple et condamnant les bombardements américains faisant de nombreuses victimes innocentes. La visite en Afghanistan de groupes d'Américains ayant perdu des proches dans les attentats du 11 septembre, pour partager la douleur des victimes des bombardements, est l'exemple parfait de l'humanisme et de l'amour de la paix que l'on connaît des Américains. Les Afghans n'oublieront jamais ces gestes. Les larmes de milliers d'Américains et d'Afghans donneront naissance à une fontaine d'amour et de liens sincères entre les deux peuples. Nous sommes fières d'avoir reçu un grand soutien moral et matériel de la part de milliers d'Américains, malgré la marginalisation que nous avons subie par les administrations et institutions gouvernementales américaines successives. La mise en place de nombreux projets n'aurait pas été possible sans la générosité américaine. Notre immense gratitude au peuple américain est notre réponse à tous ceux qui prétendent que "RAWA est anti-américaine".
Nous ne voyons pas la campagne militaire américaine en Afghanistan comme une aggression contre l'Afghanistan ou comme une guerre contre le peuple afghan, ou même une aggression contre l'Islam ou les Musulmans, mais comme un conflit d'intérêt entre des maîtres et leurs ex-protégés. Contrairement à certaines organisations féministes craintives et complaisantes, la disparition totale des taliban, d'al-Qaeda mais aussi des criminels moudjahidins est la priorité politique de RAWA. Le sang versé et la misère subie par notre peuple affligé par le fondamentalisme - appelés "dommages collatéraux" par euphémisme - à la suite de la répression américaine contre ses anciens agents rebelles, ne peuvent que nous inciter à nous opposer à la guerre américaine en Afghanistan. Nous avons souvent clamé qu'une injonction claire et opportune de l'ONU dirigée vers tous les pays qui financent les taliban et leur vendent des armes, couplée à une demande forte pour que tous les pays soutiennent les forces anti-fondamentalistes et démocratiques en Afghanistan étaient le meilleur moyen de contenir les taliban et al-Qaeda et d'écourter la durée de vie de cette vermine.
2. RAWA et la lutte contre le terrorisme
On ne peut pas combattre un groupe fondamentaliste en en soutenant un autre. Dans sa guerre contre les taliban et al-Qaeda, les Américains se sont alliés à l'"Alliance du nord" en courtisant et en armant certains chefs de guerre infâmes. Par là, les Américains sympathisent avec les pires ennemis de notre peuple et poursuivent leur politique tyrannique contre les Afghans, comme ce fut déjà le cas des diverses administrations américaines depuis vingt ans. La puissance militaire et financière ne suffira pas à faire disparaître les taliban et al-Qaeda. La guerre contre les taliban et al-Qaeda n'est pas seulement une guerre militaire et financière, mais également une guerre idéologique. Tant que la mentalité des taliban et de Ben Laden & Co. persistera, nous serons de nouveau inévitablement amenés à assister à leurs actes de barbarisme, que ce soit en Afghanistan ou ailleurs. La tanière de ces criminels en Afghanistan est assiégée. Les forces démocratiques et anti-fondamentalistes en Afghanistan doivent combattre les taliban, al-Qaeda et leurs alliés fondamentalistes sans relâche et résolument, jusqu'à l'éradication du terrorisme et du fondamentalisme sous toutes ses formes dans notre pays. Seul l'enracinement de la démocratie en Afghanistan, avec le soutien illimité de la communauté internationale, peut apporter la victoire finale sur le terrorisme et le fondamentalisme.
3. La situation après la chute des taliban
La conférence de Bonn sur l'Afghanistan avait pour objectif de former un gouvernement d'intérim et de définir ce qu'il y avait à faire à long terme, après l'écrasement des taliban et d'al-Qaeda. A l'exception des sympathisants de l'ancien roi, les trois quarts des participants étaient des représentants infâmes de l'Alliance du nord et des alliés de l'organisation terroriste de Golbodin Hekmatyar. Ainsi, malgré la bénédiction des médias occidentaux, cette conférence de Bonn ne peut constituer le départ de la paix et de la démocratie pour notre peuple. Les ministères importants ayant été cédés à des personnages dont les crimes terribles hantent encore notre peuple et l'empirement de la situation de sécurité à Kaboul et dans d'autres provinces n'ont fait que confirmer nos prédictions déjà anciennes, basées sur l'histoire de l'Alliance du nord. La présence d'une ou deux femmes en vitrine du gouvernement d'intérim (l'une étant membre d'un parti tristement célèbre pour être à la botte du régime iranien et l'autre précédemment haut placée au sein d'un parti prêchant la trahison de la patrie) est plus une insulte aux femmes afghanes qu'un symbole de la restauration de leur statut et de leurs droits. Les femmes afghanes ne sont toujours pas libérées. Ceci a été très succinctement résumé par le New York Times du 26 novembre 2001, dans un article sur une veuve afghane avec huit enfants à nourrir: "Au moins maintenant, elle est libre de mendier" !
RAWA a sans cesse répété que, dans les conditions actuelles, aucune puissance, à part le peuple afghan lui-même, ne peut les protéger du fondamentalisme. Il n'y a aucun précédent dans l'histoire où une nation ou des nations étrangère(s) ayant elle(s)-même(s) nourri des agents du fondamentalisme ou de l'esclavage, ont pu libérer une nation sous le joug de ces mêmes agents. C'est pourquoi RAWA a toujours appelé le peuple à se soulever contre les taliban, al-Qaeda et tous les fondamentalistes. C'était la condition sine qua non qui aurait pu éviter d'en arriver aux circonstances qui ont conduit aux bombardements américains et au massacre d'innocents, et aussi pour éviter qu'un groupe de vampires religieux n'obtienne une partie du pouvoir après le départ des taliban en Afghanistan.
M. Karzai, qui ne bénéficie d'aucun soutien d'organisation indigène ou force armée, est, avec ses collègues, l'hôtage des criminels de l'Alliance du nord. M. Karzai, qui n'est pas fondamentaliste, a collaboré par le passé avec Burhanuddin Rabbani et sa clique, et a donc estimé qu'en s'entourant de criminels et en récompensant des chefs de guerre comme Rabbani, il récolterait des dividendes politiques. Malheureusement, il ne sait pas ou ne veut pas savoir que ses ministres principaux ont perpétré des crimes atroces contre notre peuple - des infâmies bien plus grandes et bien plus impardonables et inexpiables que celles des taliban. M. Karzai peut être certain que le gang Rabbani, qui a pu goûter des années durant le pouvoir avec le trafic de drogue et le pillage des richesses sous couvert de l'immunité diplomatique, ne se contentera jamais d'usurper quelques postes clés au sein du gouvernement. Ils patienteront avant de pouvoir accaparer le pouvoir et l'exercer de manière tyrannique.
Les efforts révoltants du groupe Rabbani pour canoniser leur icône, Ahmad Shah Massoud, et leurs déclarations ferventes sous ses portraits sont le signe qu'ils se préparent à des conspirations. Les "gentlemen" du gang Rabbani, ex-fondamentalistes et nouveaux "démocrates", ont été fidèles à des hommes comme Abdullah Ozzam et Oussama ben Laden bien plus encore que les taliban, et se sont nourris plus longtemps des restes provenant de la table de ces derniers. Avec leur nouvelle obsession ridicule d'apparence "civilisée" avec l'acquisition d'habits à la mode en Europe, ils peuvent réussir à cacher leur vraie nature politique et idéologique face à des personnes superficielles surtout en Occident, mais ils ne réussiront jamais à cacher les taches de sang qui les souillent aux yeux de notre peuple. Les récentes luttes entre les prédateurs fondamentalistes dans les provinces de Paktia et de Ningarhar, les beuglements de Karim Khalili dans la région du Hazarajat, les brutalités de Rashid Dostum et sa bande de voyous dans le nord de l'Afghanistan, la débauche politique d'Ismael Khan dans la région d'Herat, et les intrigues de Rabbani et de sa bande meurtrière à Badakhshan, etc. etc., sont tous des signes des traîtrises à venir. Avec l'établissement de la paix et de la démocratie et le début de la marche vers le développement et le progrès, tous ces "gentlemen" vont se retrouver en dehors de la logique de la souveraineté par l'infâmie et le fondamentalisme religieux et resteront tapis en attendant de pouvoir ensanglanter encore Kaboul et étendre leur pouvoir dans le pays.
Le meurtre du ministre de l'aviation, Dr. Abdurrahman, est un avertissement pas très subtil à l'ancien roi, M. Karzai, et à ses amis. C'est un aperçu des intrigues et des infâmies dont les ennemis les plus dépravés de notre peuple qui entourent M. Karzai sont capables, pour protéger leurs intérêts criminels. Dr. Abdurrahman a été liquidé car ses assassins ne le croyaient pas capable de garder les secrets honteux qu'il partageait sur Ahmad Shah Massoud, le Dr. Abdullah, le Général Fahim et d'autres leaders du Jamiat-i-Islami. Si le Dr. Abdurrahman avait parlé, cela aurait mis en péril la stratégie de duperie qu'ils ont tous adoptée, en cachant leur vrai visage pour convaincre tout le monde.
M. Karzai : il est possible que le peuple afghan s'abstienne de vous qualifier de second Shah Shuja ou de second Babrak Karmal, parce que vous avez été placé dans votre position dans l'urgence et comme alternative aux assassins du style Golbodin Hekmatyar, Sayyaf, Khalili et autres, mais ce peuple ne vous pardonnera pas indéfiniment votre indulgence ou votre acceptation des actes barbares des moudjahidins -cela finira par vous porter ombrage. Le test de votre compétence et de votre honnêteté - ou de celles des leaders afghans - sera votre conduite politique envers les fondamentalistes et leurs maîtres étrangers, ainsi que votre fidélité aux principes de la démocratie.
Certains évoquent le besoin d'une réconciliation nationale en Afghanistan et citent en exemple le pardon des Nazis en Allemagne et dans d'autres pays. Si une telle comparaison n'est pas le produit de l'ignorance quant à la nature et au nombre des atrocités commises par les fondamentalistes afghans, elle ne peut avoir d'autre objectif que d'exiger des Afghans qu'ils soient joyeux lors des funérailles de leurs proches. Comment peut-on demander à la nation afghane de pardonner et de se réconcilier avec des bandes et des individus qui, de 1992 à 1996, ont perpétré tellement d'atrocités et ont tellement dévasté le pays ? En plus, ces "messieurs" n'éprouvent pas les moindres remords, ils font preuve d'une condescendence et d'un dédain incroyables, dans leur rôle de ministres ou d'ambassadeurs, envers les gens auxquels ils ont fait du tort. Pour reprendre l'exemple des nazis : d'abord, tous les chefs nazis ont été punis ou exécutés, deuxièmement, et c'est encore plus important, les officiers nazis qui n'ont ni été portés en justice ni exécutés, n'ont pas non plus été intégrés au gouvernement pour décider du destin des gens en Allemagne ou dans un autre pays. La communauté internationale doit savoir que les atrocités perpétrées par les fondamentalistes afghans sont incomparables à celles des nazis ou fascistes ou de toute autre entité politique. Même les frères de croyance algériens des fondamentalistes afghans, qui n'ont aucune difficulté à égorger les nouveaux-nés, n'iraient pas jusqu'à violer les mères de famille, les filles et les garçons, pratique favorite de l'Alliance du nord qui violent d'abord leurs victimes avant de les tuer et de les piller. Nous ne pouvons nous réconcilier avec de tels criminels dépravés, surtout tant qu'ils seront dans une position dominante. Tant que de tels criminels ne seront pas portés en justice, le procès de criminels moindres par les tribunaux internationaux à La Haye ou ailleurs, pour crimes de guerre ou crimes contre l'humanité, sont au mieux un exercice insuffisant et travesti de la justice. Les criminels serbes et non serbes sont des enfants de choeur comparés à leurs confrères afghans. Si le déploiement de troupes et les actions militaires contre les taliban et al-Qaeda est une cause juste, poursuivre les criminels de l'Alliance du nord est la condition sine qua non pour la paix, la démocratie et la justice en Afghanistan.
Certains demandent, "Pourquoi RAWA ne peut-elle accepter aucun gouvernement en Afghanistan ?" La réponse est simple : parce qu'aucune des forces politiques présentes ou passées n'est assez démocratique ni respectueuse des droits inaliénables des femmes. Nous ne pourrons jamais comprendre ceux qui, pendant des années, ont commis des atrocités contre notre peuple.
4. L'instauration de la paix
Actuellement, malgré la présence de plusieurs milliers de soldats étrangers à Kaboul, la capitale n'est toujours pas sûre, et il n'y a aucune alternative au déploiement d'une force de sécurité de l'ONU à travers le pays pour assurer des conditions de sécurité suffisante pour convoquer une Loya Jirga et, plus important, un suffrage national. Malgré toutes les critiques exprimées contre le modus operandi de l'ONU, RAWA préfère la présence des troupes de l'ONU au déchaînement des psychopathes moudjahidin sur la population afghane. Mais ces troupes de l'ONU ne devraient pas inclure de troupes des pays qui ont soutenu les fondamentalistes et les chefs de guerre brutaux par le passé, comme la Turquie par exemple, qui a été le soutien principal de Dostum.
5. Les pays voisins
Il semble que le régime iranien, après des années de flirt avec Golbodin Hekmatyar et la mise en place du "processus de Chypre" pour la défense de ses intérêts, soit en train de le lâcher. Mais un tel renversement ne dupe personne. Le seul objectif du régime sanglant iranien visé par ce clivage avec Golbodin est de cacher ses manoeuvres dangereuses et trompeuses pour empêcher la réunification de l'Afghanistan, en renforçant et en soutenant ses laquais, Ismael Khan et Karim Khalili. Avec la chute de leurs confrères taliban, le régime iranien de Vilayat-e-Faqih a été secoué dans ses fondations, et pour troubler la situation en Afghanistan, il a choisi d'abriter les taliban et les fuyards d'al-Qaeda.
C'est un grand malheur pour notre pays infortuné d'avoir un régime aussi sanglant que le régime iranien pour voisin. C'est un double malheur que d'avoir à l'est un autre voisin, le Pakistan, avec lequel nous partageons des centaines de kilomètres de frontières du nord-est au sud-ouest et dont la politique afghane a été basée ces 23 dernières années sur des leaders, des services secrets et des partis islamistes pour créer, nourrir et entraîner les moudjahidin criminels et les bandes de taliban afin qu'ils ravagent le peuple afghan. Le gouvernement pakistanais actuel a pris des mesures pour museler les partis fondamentalistes et terroristes pakistanais, mais comme le déclarait RAWA, ces mesures sont loin d'être suffisantes pour s'assurer de la confiance des Afghans à moins que 1) des centaines d'assassinats, d'enlèvements, d'extorsions, d'actes de torture et autres affaires criminelles perpétrées par les leaders et les membres clés des organisations terroristes, y compris et surtout provenant de la bande de Golbodin Hekmatyar ne soient jugés à la suite des plaintes déposées par de nombreuses familles de victimes afin que justice soit faite ; et, 2) que les leaders et membres du Jamiat-e-Khoddam al-Furqan (Association des Serviteurs du Coran) incluant le mollah Abdul Hakim Mujahed, qui sont tous une nouvelle version de taliban, ne soient arrêtés, jugés et punis.
De même, les gouvernements tadjik et ouzbek ne pourront gagner la confiance des Afghans que s'ils délivrent les documents prouvant l'appui qu'ils ont offert durant des années aux terroristes de l'Alliance du nord et en s'engageant à arrêter toute forme de soutien à leurs anciens protégés.
6. La reconstruction de l'Afghanistan
Le versement de milliards de dollars dans un pays dirigé par la mafia fondamentaliste ne peut bénéficier aux Afghans. Dans de telles circonstances, le seul résultat obtenu par ce flux d'argent sera de remplir les coffres de la Cosa Nostra religieuse et de financer ses activités terroristes à l'intérieur et à l'extérieur de l'Afghanistan. Dans un pays comme l'Afghanistan, où l'on ne dispose d'aucune infrastructure légale ou d'un semblant de gouvernement démocratique, la plupart des questions sociales et économiques doivent être traitées comme des questions d'ordre politique. La gestion satisfaisante des problèmes sociaux et économiques en Afghanistan et leur résolution dans l'intérêt du peuple afghan dépendent avant tout de la formation d'un gouvernement démocratique en Afghanistan. Nous attirons l'attention de tous les pays, qui souhaitent contribuer à la réhabilitation et à la reconstruction de l'Afghanistan, sur le point souligné plus haut.
7. Loya Jirga (Grand Conseil)
RAWA ne considère pas la Loya Jirga comme une institution démocratique compatible avec les exigences de la vie politique d'une nation dans le monde actuel. Toutefois, au vu de la situation actuelle, dans laquelle l'ombre des fondamentalistes barbus et de leurs fusils plane toujours sur le pays, la Loya Jirga, certes anachronique, peut jouer un rôle historique positif pour la nation. Mais nous restons réservées quant au fait qu'aucun des 21 membres du Comité préparatoire pour la convocation de la Loya Jirga n'ait lutté contre les criminels moudjahidin et que certains ont même été très conciliants envers les taliban. Avec un tel comité, la nature et la compétence de la Loya Jirga peuvent être remises en question. Il est "amusant" de noter que l'une des femmes membres de ce comité, en plus d'être un ancien membre de la faction Parcham du PDPA (supportant les Soviétiques) tombé en disgrâce, a été mise sous le feu des projecteurs par les médias internationaux en même temps que l'entrée de Rabbani à Kaboul. Qui représente-t-elle ?
Selon toute évidence, les conseillers de M. Lakhdar Barahimi ont orienté le choix des membres du Comité préparatoire pour la convocation de la Loya Jirga, dans la direction opposée à celle des aspirations du peuple afghan. M. Barahimi doit savoir que si la Loya Jirga devait être composée de fondamentalistes, comme c'est le cas du gouvernement d'intérim, l'ONU, et l'ONU seulement, serait responsable d'une nouvelle tragédie afghane, car personne ne fera porter la responsabilité sur ces conseillers. La sélection, uniquement sur la base de leur affiliation religieuse ou ethnique, des acteurs qui doivent jouer un rôle dans l'une des institutions est inadaptée. Nous devons être libérés du fondamentalisme provenant des représentants de chaque groupe ethnique ou religieux. Sinon, il est très probable que la Loya Jirga comprendra certes des représentants de chaque groupe tribal, ethnique et religieux présent en Afghanistan, mais que ces derniers contamineront le pays par leur fondamentalisme. On peut imaginer le dénouement.
L'une des femmes membres du gouvernement d'intérim, qui nie faire partie de la direction d'un parti fondamentaliste raciste, a admis ne pas représenter le peuple afghan. Ne pas être représentatif d'un peuple parce qu'on a vécu longtemps en exil n'est pas crucial. Ce qui importe c'est d'avoir l'esprit libre de tout fondamentalisme pour pouvoir faire partie d'un front patriotique, démocratique et progressiste luttant idéologiquement contre la perfidie des moudjahidin et des taliban. Si la Loya Jirga ne forme pas un tel front, elle ne sera qu'un instrument d'adoption de décisions prises par des fondamentalistes anti-démocrates.
8. La Constitution
La Constitution afghane datant de 1964 peut, en incluant les amendements suivants, être acceptée par la majorité des Afghans (excepté les fondamentalistes) :
- Retrait des références faites à la religion officielle et à la branche schismatique. Les Constitutions de nombreux pays islamiques en sont dépourvues. Pourquoi la Constitution afghane n'incluerait-elle pas cette caractéristique démocratique ? Pourquoi, par la reconnaissance d'une seule religion et branche religieuse, devrait-on marginaliser les personnes de confession différente ? Pour que la Constitution devienne un formidable rempart contre l'émergence du fondamentalisme et de la dérive religieuse, elle doit stipuler que l'utilisation de la religion pour la promotion d'objectifs politiques est strictement interdite et peut mener à des poursuites judiciaires.
- Sécuralisme et séparation de la religion de la politique et de l'État : RAWA a souvent affirmé que la seule voie pour empêcher notre nation d'être affligée par le fondamentalisme ou tout autre mal justifié par la religion, maintenant ou à l'avenir, était la séparation de la religion de la politique et de l'État. L'inclusion explicite de cette disposition dans les Constitutions d'autres pays islamiques n'a pas été jugée étrange ou anti-islamique. Il n'y a aucune raison pour que la Constitution afghane ne présente pas ce facteur de démocratie. Ceux qui considèrent les appels au sécularisme comme un penchant anti-religieux le font soit par ignorance, doit pour servir intelligemment ou pas les intérêts des fondamentalistes.
- Établissement d'un quota de sièges réservés aux femmes au Parlement.
- Abrogation de la torture et des exécutions, quel qu'en soit le motif.
RAWA présentera des propositions plus élaborées ultérieurement.
9. Le futur État afghan
Au vu de la composition du gouvernement d'intérim, RAWA ne considère pas celui-ci comme compétent pour exercer sur la base de principes démocratiques. Même si M. Karzai et certains de ses partenaires sont sincèrement dévoués à la cause de la démocratie, ils sont paralysés dans les tentacules des ennemis avoués de la démocratie.
RAWA appelle la venue d'un futur État afghan basé sur les principes suivants :
- Adhésion totale aux principes et critères de démocratie et au sécularisme
- Interdiction stricte de toutes formes de décrets, fatwas, etc. dirigés contre les femmes pour leur imposer leur tenue vestimentaire, etc. (Dix ans d'oppression et de guerre vile contre les femmes ne suffisent-elles pas ?)
- Abrogation totale des organisations policières politiques ou autres institutions d'espionnage, de torture ou de harcèlement, que ce soit de Parchami, Khalqi, Jihadi, taliban ou autre. (Création d'un musée des atrocités perpétrées par ces régimes successifs.)
- Pousuite de tous ceux qui, pendant 23 ans, se sont rendus coupables de haute trahison, de crimes de guerre, de violations flagrantes des droits de l'homme et de pillage des biens nationaux.
- Abolition et interdiction de toutes les écoles religieuses et autres berceux du terrorisme où l'on forme les moudjhaidin et les taliban.
- Recherche et réappropriation des centaines de millions de dollars détournés par les moudjhadin et les taliban des caisses de l'État ou provenant des fonds d'aide internationale. (Cette recherche et cette réappropriation devraient inclure les 10 000 000 $ donnés par le Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif à Sebghatullah Mojadedi, premier président moudjhaidin afghan. Cette somme est inconséquente comparée aux détournements des centaines de millions de dollars par d'autres leaders moudjahidin, mais elle est bien documentée.)
- Départ des membres des partis moudjahidin et taliban des postes haut placés de l'État. Départ des intellectuels qui, en Afghanistan ou à l'étranger, ont honteusement mis leur talent, leurs écrits ou leur voix au service des criminels moudjhaidin et taliban. (L'extradition des idéologues taliban et de l'Alliance du nord doit être requise par les USA, le Canada, les autorités européennes et australiennes, et les autorités de tous les autres pays qui abritent ces éléments. Des poursuites judiciaires doivent être initiées contre ces individus pour leur servitude vénale aux escrocs moudjahidin et taliban.
Laissons les opposants à RAWA exprimer leurs accusations contre RAWA. Que les soit-disant valets intellectuels des criminels moudjhaidin et taliban disent ce qu'ils ont à dire sur RAWA. Laissons les imbéciles prétendre que les Afghanes, par leur conditionnement religieux et culturel, doivent consentir au despotisme médiéval des moudjhaidin ou taliban et ne sont pas dignes de liberté et de démocratie. L'Association Révolutionnaire des Femmes Afghanes lutte depuis plus de vingt ans face à la mort, et pire encore, pour la défense de la démocratie et de l'émancipation des femmes. Nous ne reculerons pas devant la diffamation des réactionnaires et misogynes et les vitupérations à notre encontre. Nous nous appuyons sur les masses de femmes afghanes en deuil et à l'agonie et sur les autres forces démocratiques dans notre pays pour ne pas reculer ni perdre des yeux nos nobles objectifs.
Inspirées par le sang de Meena versé sur cette voie, et résolues comme jamais pour créer un Afghanistan libre, prospère et démocratique, nous avancerons et lutterons à la tête de la légion de femmes du pays. Les femmes du monde nous trouverons à nos postes, telles un bataillon de la grande armée des femmes partisanes de la liberté autour du monde.
Renforçons plus que jamais la lutte des femmes afghanes contre la guerre et le fondamentalisme et pour la liberté et la démocratie !
Vive la solidarité de RAWA avec les femmes amoureuses de la liberté et avec les organisations féministes dans le monde entier !
Association révolutionnaire des femmes afghanes (RAWA)
8 mars 2002 - Peshawar