ABCnews.com, 15 août 2001 |
Les femmes afghanes s'adressent au monde
Le Web permet de communiquer internationalement
Par Dianne Lynch
L'Association Révolutionnaire des Femmes Aghanes, ou RAWA, combat clandestinement contre la souffrance des femmes sous le régime des fondamentalistes islamiques talibans.15 août : imaginez-vous : vous ne pouvez pas travailler. Vous ne pouvez pas aller à l'école. Vous ne pouvez pas sortir sans un accompagnateur masculin et même dans ce cas, vous devez vous recouvrir des pieds à la tête.Vous ne pouvez pas rire ou parler en public et vos chaussures doivent être silencieuses. Se maquiller ou montrer ses chevilles est puni par le fouet, des femmes portant du vernis à ongles se sont vues trancher les doigts.
Vous devez peindre vos fenêtres en noir pour ne pas être vue de l'extérieur. Vous ne pouvez pas déambuler sur votre balcon ou dans votre cour. Vous n'avez pas senti le soleil sur votre visage depuis des années. Vous avez perdu toute référence à la vie publique.
Vous êtes une femme en Afghanistan aujourd'hui, vivant sous le régime des talibans, des fondamentalistes islamiques.
Et, si vous faites partie des quelque 2000 femmes membres de RAWA, vous vous servez d'Internet pour vous battre.
Restrictions sur les femmes
Fondée en 1977 par le poète féministe afghan Meena, RAWA était une organisation de défense des droits de l'homme petite mais florissante, dont le but était d'inciter les Afghanes à lutter pour la démocratie. Pendant toute l'invasion soviétique de 1979 et la guerre civile qui s'en suivit et qui fit des millions de morts et des milliers d'exilés au Pakistan, RAWA travaillait clandestinement pour fournir éducation et soins sanitaires à des femmes et des enfants afghans.
Puis, en 1996, la milice formée par les talibans — qui signifie "étudiants de la religion" — a pris le contrôle du pays. Ces ultrafondamentalistes interdisent la musique, le cinéma, la télévision, les pique-niques, les jouets, les appareils photo, les cigarettes, l'alcool, les magazines, les journaux et la plupart des livres.
Les femmes subissent des restrictions encore plus grandes. Le port de bijoux, de vêtements de couleur, de chaussures à talons et de chaussettes blanches est interdit. Les mariages sont arrangés, les femmes sont du véritable bétail. Les victimes de viols peuvent être lapidées pour adultère. Avant l'arrivée des talibans, 40 pour cent des médecins étaient des femmes. Aujourd'hui, les femmes ne peuvent être soignées par des médecins hommes et il ne reste plus de médecins femmes.
Du secret à la clandestinité
RAWA a toujours agi secrètement, désormais elle doit agir de manière totalement clandestine. Ceci pour une bonne raison : être membre est punissable de mort.
"RAWA a 23 ans d'expérience dans la lutte dans des conditions défavorables, dures et sanglantes, nous savons donc très bien travailler clandestinement," nous explique une porte-parole de RAWA, dont le pseudonyme est Mehmooda. "Lors de nos manifestations et autres réunions publiques, nos membres actifs ayant un rôle important essaient de ne pas se montrer, ou si leur présence est nécessaire, elles se déguisent."
Malheureusement, les talibans ont réussi à identifier plusieurs membres du groupe. "Nous devons reconnaître que malgré toutes nos précautions, certains membres ont été indentifiés par l'ennemi. Elles vivent désormais complètement cachées."
Malgré ce châtiment, RAWA continue de fonctionner. Elle a créé des écoles est des orphelinats dans les camps de réfugiés du Pakistan, ainsi que des écoles chez les particuliers en Afghanistan. Ses équipes sanitaires mobiles soignent les femmes et les filles qui ne peuvent être examinées par des docteurs afghans. L'association aide les veuves à nourrir leurs enfants.
Le Web : porte ouverte sur le monde
Depuis 1997, le Web permet à l'association de raconter son histoire à un public mondial, à l'adresse http://rawa.org
C'est une histoire sinistre. La galerie de photos du site est une galerie des horreurs. Un homme au sourire narquois tient les mains amputées d'un voleur, des hommes pendus le 8 août au centre de Kaboul, l'exécution publique d'une femme, des enfants mutilés et assassinés.
Mais, le site Web ne se contente pas de choquer et d'horrifier. Il informe et sollicite de l'aide. Les journalistes n'étant pas admis en Afghanistan, le site de RAWA est souvent la seule source d'informations non contrôlée. Il représente une plate-forme permettant à RAWA de demander de l'aide.
Après qu'une porte-parole de RAWA a décrit, lors de l'émission de télévision Oprah, comment les membres du groupe cachent des caméras sous leur voile pour filmer les exécutions et les châtiments au fouet en public, les téléspectateurs ont fait parvenir des dizaines de caméras. Aujourd'hui, RAWA demande des caméras plus petites, assez petites pour être cachées facilement, et des dons pour financer ses programmes.
Mehmooda nous explique que les sympathisants sont également incités à inviter des représentants de RAWA pour parler lors d'événements, à organiser des manifestations en solidarité avec les Afghanes, à faire don de médicaments, de produits de papeterie, de chaussures, d'équipement médical et d'ordinateurs, à écrire au gouvernement américain pour lui demander de soutenir la démocratie et des élections libres en Afghanistan.
"Si vous êtes un amoureux de la liberté et anti-fondamentaliste, vous êtes du côté de RAWA", nous affirme le site
Désormais, nous avons l'occasion de le prouver, grâce au Web et au courage des femmes qui l'utilisent pour apporter du changement.
Vous pouvez envoyer vos dons à : The Afghan Women's Mission, 2460 N. Lake Ave. PMB 207, Altadena, CA 91001.
Professeur et journaliste, Dianne Lynch est l'auteur de Virtual Ethics. Wired Women est publié tous les deux mercredis